3 questions à Enki Bilal
Quel regard portez-vous sur le Musée des Arts et Métiers ?
Ce lieu m’apparaît comme le musée de la folie humaine, là où l’humain se révèle dans tous ses états. Je le dis avec tendresse car on y découvre une belle folie, un ensemble d’inventions qui nous permettent cette traversée hallucinante de nombreuses époques. Au fond, ce sont ces objets qui nous ont amenés là où nous sommes, car notre monde a été façonné par les inventeurs, par les chercheurs… Les visites successives pour préparer l’exposition m’ont permis de connaître le musée mieux encore, et de l’aimer, car il est à la fois attachant et profond, et il raconte tellement d’histoires !
Comment s’est déroulé le choix des oeuvres et des objets, ainsi que celui des contributeurs de l’exposition ?
Pour les contributeurs, je souhaitais faire appel à des chercheurs du Cnam mais aussi à des écrivains, à des artistes, pour que le scientifique puisse côtoyer l’imaginaire, qui est plus mon domaine. Je suis ravi du résultat, ce dialogue inattendu entre des personnes d’horizons différents, et je les remercie de s’être prêtées à l’exercice. Quant au choix des objets présentés dans l’exposition, il fait partie d’une démarche assez ludique, et s’est fait par tâtonnements, au gré des visites dans les réserves du Conservatoire national des Arts et Métiers. Beaucoup de ces objets nous paraissent inexplicables, d’ailleurs je sais que de nombreux spécialistes n’arrivent plus à déterminer aujourd’hui l’usage de certains d’entre eux. J’ai choisi des objets qui m’attiraient par leur esthétique ou par leur fonction, et certains ont à voir avec mon univers, ou bien se trouvent réinterprétés, comme par exemple le turboréacteur ATAR qui devient la capsule de Nikopol.
D’où vous est venue l’idée du titre de l’exposition, Mécanhumanimal ?
J’aime beaucoup jouer avec les mots, et j’attache une certaine importance à la recherche du titre de mes livres, cela me paraît nécessaire d’avoir en tête un titre avant de me lancer dans la création. Le nom « Mécanhumanimal » m’est venu à la suite d’une discussion avec les gens du musée. Il me semblait bien définir ce lieu, car il paraît évident que le musée est un ensemble de rencontres par la mécanique autour de l’inventivité humaine, et que l’Homme n’est jamais loin de l’animal qu’il a été. La mécanique, les machines qui y sont présentées ont beaucoup emprunté au physique, à la morphologie de l’humain et de l’animal. Ce titre m’est donc apparu comme une évidence !